Titre de thèse :
Caractéristiques de la parole et du comportement oculomoteur du trouble cognitif induit par un cancer et ses traitements
Résumé :
Grâce à l’amélioration des soins en oncologie, certains cancers tendent à devenir une maladie longue durée et la vie après cancer est désormais un enjeu de santé publique. Les cancers du sein, en particulier, sont les plus fréquents chez les femmes et sont également les mieux soignés.
Les cancers et leurs traitements peuvent être à l’origine de troubles cognitifs subtils appelés Cancer-Related Cognitive Impairment (CRCI). Ces troubles toucheraient jusqu’à 75% des patientes et peuvent persister au-delà de deux ans après l’arrêt des traitements actifs (chimiothérapie, radiothérapie et chirurgie). Ils entraînent des répercussions négatives sur la qualité de vie des patientes, allant jusqu’à entraver leur reprise professionnelle ou limiter leur participation à des activités sociales. Les patientes se plaignent de distractibilité, d’oublis, d’avoir du mal à être en double tâche ou encore de rencontrer des difficultés liées au langage et à la communication (manque du mot, difficultés de planification syntaxique).
Si les tests objectifs révèlent parfois une atteinte de l’attention, de la mémoire, des fonctions exécutives et du langage, il existe pourtant une discordance entre l’intensité de la plainte et les scores des tests neuropsychologiques, souvent dans les normes. Ce décalage pourrait s’expliquer par un manque de sensibilité et de validité écologique des tests, conçus pour des troubles plus sévères. À l’heure actuelle, les mécanismes du CRCI (mnésiques, exécutifs ou attentionnels) restent mal identifiés. De plus, le manque d’outils diagnostiques spécifiques empêche pour certaines patientes l’accès à un accompagnement adapté et ralentit l’avancement de notre compréhension de ces troubles.
Une des manifestations les plus courantes du CRCI, le manque du mot (ou anomie), pâtit particulièrement du défaut de sensibilité et d’écologie des tests, puisqu’évalué par des tâches de fluence et de dénomination. Dans le discours, l’anomie se caractérise par des interruptions du flux de parole (pauses, répétitions ou reformulations d’une phrase) lors de la recherche d’un mot. L’analyse de ces accidents de parole, appelées disfluences, peut non seulement déceler une modification fine du langage, mais peut également contribuer à l’identification des mécanismes cognitifs sous-jacents.
La parole et le regard entretiennent des liens étroits et des études ont montré l’intérêt des technologies d’eye-tracking pour mesurer certaines fonctions cognitives. En combinant analyse de discours et eye-tracking, nous souhaitons pallier le manque d’outil pour l’évaluation du CRCI. Nos objectifs sont (i) d’identifier les difficultés linguistiques des patientes grâce à l’analyse de discours, (ii) mieux comprendre l’origine cognitive des troubles, (iii) développer un outil diagnostique basé sur l’analyse des disfluences pour aider à orienter la prise en soin des patientes.
Direction de thèse:
Fabrice HIRSCH, PhD (PR, Université Paul-Valéry Montpellier 3, Praxiling UMR 5267 ) & Pr Sophie JACQUIN-COURTOIS, PhD, M.D. (PU-PH, Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon UMR 5292 ; Hospices Civils de Lyon)